On reproche à la Haica d’avoir eu un rôle se limitant, ou presque, à infliger des amendes se chiffrant à des dizaines de milliers de dinars, sans effet dissuasif ni contraignant.
Un des événements marquants de la fin de l’année 2023 est la décision annoncée officiellement de suspendre les salaires de tous les membres de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica ), selon une révélation d’un de ses membres les plus actifs, en l’occurrence Hichem Snoussi.
En effet, par le biais d’un courrier électronique adressé par le secrétaire général du gouvernement, la Haica a été informée de cette décision qui concerne tous les membres de son conseil à partir du mois de janvier 2024.
Et d’enchaîner, dans une déclaration, que cette mesure ne concerne pas les fonctionnaires de la Haica, mais uniquement les membres de son conseil (3 retraités, un détaché et deux membres en service), tout en considérant que «cette mesure n’est autre que la facture que devra payer l’instance pour avoir défendu son indépendance et refusé de se faire entraîner dans le jeu des alliances…».
Pour ses partisans, le volet constitutionnel n’a aucune importance
Cette décision veut-elle dire, pour autant, que la Haica est «enterrée» ? Pourtant, certains n’ont pas hésité à annoncer sa «disparition pure et simple», en prenant pour argument le fait que la Haica n‘est pas mentionnée, dans les textes de la nouvelle Constitution de 2022, en tant qu’instance constitutionnelle.
Ainsi, n’étant plus, officiellement, une entité constitutionnelle, les spéculations vont bon train entre les uns et les autres autour du maintien ou pas de la Haica. Les partisans estiment que le volet constitutionnel n’a aucune importance dans la mesure où elle avait été créée en 2012, en vertu du décret-loi n° 2011-116 du 02 novembre 2011, relatif à la liberté de la communication audiovisuelle, avant d’être annoncée officiellement le 3 mai 2013, à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse.
D’ailleurs, c’est dans ce cadre-là que le même Hichem Snoussi estime que la suspension du paiement des salaires est une mesure «illégale puisque la Haica est une autorité qui exerce ses prérogatives de manière indépendante, loin de la tutelle du gouvernement».
Pour le même Snoussi, la suspension des salaires des membres du Conseil ne peut entraver le fonctionnement de l’instance ni empêcher les employés de continuer à exercer leurs fonctions mais sans salaire.
Toutefois, il est bon de rappeler que le conflit entre le pouvoir exécutif et la Haica a vu le jour un certain 18 novembre 2022, lorsque la Haica avait refusé de signer la décision numéro 31 de l’Instance supérieure indépendante des élections (Isie), modifiant la décision n°8 du 20 février 2018 relative aux règles et conditions auxquelles les médias doivent se plier durant la campagne électorale et la campagne référendaire.
Les membres envisagent-ils de poursuivre leurs activités sans rémunération ?
Depuis cette date, la Haica a entamé une longue phase d’agonie jusqu’en juin 2023, lors de la nomination de la nouvelle PDG de la Radio nationale que certains ont, d’ores et déjà, qualifiée de la vraie «mort du décret-loi 116» qui justifie, selon les défenseurs de la Haica, l’élément clé justifiant l’existence de l’Instance.
Nombreuses sont les voix qui critiquent sévèrement la posture de la Haica, à savoir la mise en veilleuse de la majorité de ses membres, à part le seul hyperactif Hichem Snoussi qui fait le tour des médias avec des plaidoiries qui sont les siennes.
On reproche à la Haica d’avoir eu un rôle se limitant, ou presque, à infliger des amendes se chiffrant à des dizaines de milliers de dinars, mais sans effet dissuasif ni contraignant. On lui reproche aussi un certain acharnement, selon certains, contre une chaîne de télévision, allant jusqu’à l’encercler par des dizaines de véhicules de la police, en épargnant une autre, qui serait «protégée» par un «super-parti» à l’époque, en l’occurrence Ennahdha.
Pour avoir une meilleure idée des perspectives d’avenir après les récentes péripéties, nous avons contacté, la journaliste Radhia Saidi, membre du Conseil de la Haica qui nous a confirmé cette option selon laquelle les membres du Conseil de l’Instance poursuivent leurs activités sans rémunération, tout en précisant qu’une réunion devra se tenir (mercredi ou jeudi prochains), pour décider de la suite à donner à cette nouvelle situation administrative et financière de l’instance.
En résumé, si pour le pouvoir, les choses paraissent claires avec une «disparition de fait» de la Haica, cette dernière semble persister à se considérer comme étant légale et active, mais sans préciser comment elle peut rendre ses éventuelles décisions opérationnelles et applicables. Car entre vouloir et pouvoir, il y a tout un monde !…